Traces dans la neige
- le voleur de silhouettes
- 16 févr. 2024
- 3 min de lecture
Dernière mise à jour : il y a 5 jours
" Il me faut trouver, entre autres choses, un nouveau nom pour l'univers, je suis las des mots anciens, ils ont signifié trop de choses pour d'autres époques et d'autres hommes."
Allen Ginsberg

Quelque part là-bas, derrière la ligne d’horizon, il y a d’autres continents, mais aussi des vies qui se fondent dans nos histoires de familles. Des secrets, des existences cachées dans les objets retrouvés par hasard dans un grenier, des photos en noir et blanc racontant les récits anciens et les pays lointains où ils naquirent, exodes, fuites, de région inconnue, où nous n’irons sans doute jamais.
Ces histoires de transhumances d’un monde à un autre de la campagne à la ville du passé au présent sont autant. De silhouettes sur des quais de départ, elles s’estompent. La neige tombe sur la plage. Nous ne sommes tous, que leurs traces.
Ce matin-là, sur ma terrasse, je regardais ces empreintes de pattes de moineaux dans un semblant de givre hivernal. Quelques flocons les oublieraient bien vite, les indices pourtant du souvenir d’un sillage me laissait songeur.

L'artiste finalement, ne fait que laisser une trace de son passage, à la manière des premiers habitants des grottes préhistoriques qui laissèrent leurs empruntes sur le temps.
La notion de trace, apparu au 13e siècle posa bien des problèmes aux philosophes, mais tous s’accordent à lui donner une fragilité qui nous laisse à penser que la trace pose la question du hasard de l'existence. L'histoire des trois frères qui parviennent à décrire l’aspect d’un animal qu’ils n’ont pas vu, à partir des indices recueillis sur son passage : un chameau blanc, aveugle, qui porte deux outres sur le dos, d’huile et de vin ; tel que le rappel Carlo Ginzburg dans ce conte oriental il y a aussi la trace non écrite, appelée par Marc Bloch « vestiges du passé ». Evoquer les traces, c’est se référer à ce qui subsiste d’un passé. Ces survivances, ces vestiges, ces ruines, peuvent témoigner d’un climat, d’un événement, d’une filiation, d’une activité humaine, d’une culture. Ces traces ont toujours intéressé les hommes dans la mesure où elles matérialisent ce qui a disparu, lui donnent une image, permettent de se le représenter, de l’étudier, de se souvenir, de commémorer, de montrer une évolution en remontant le temps. dit l’anthropologue Jean-Yves Boursier. Il cite l’exemple terrible de Simone Veil, arrêtée lors d’une rafle de la Gestapo le 30 mars 1944 à Nice, déportée à Auschwitz, elle portait sur son bras la marque que lui ont appliquée les nazis, sous la forme d’un numéro. Elle relate l’aventure qui lui est arrivée lors d’une réception au consulat de France à Mayence : « Parmi les invités, un haut fonctionnaire du quai d’Orsay, paraît-il très au fait des choses, m’interpelle et me demande, croyant faire une plaisanterie : “ C’est votre numéro de vestiaire ? ” Je me suis effondrée en larmes, il n’y avait rien à dire » Au même titre : Pierre Vidal-Naquet, citant l’historien Michel de Bouard, parlent d’« assassins de la mémoire » à propos des négationnistes, dont le seul but est d’effacer les traces des crimes nazis. Ainsi, la trace qui n’est qu’une empreinte, ou : une suite de marques le passage d’un homme, d’un animal, d’un véhicule et d ‘un fait, avec l’idée d’impression restant de quelque chose ; une quantité infime : une marque laissée par une action, un événement passé, avec pour synonyme : un indice et un reste, devient essentielle, et indispensable, à la compréhension du temps. |
![]() | « L’incompréhension du présent nait fatalement de l’ignorance du passé. Mais il n’est peut-être pas moins vain de s’épuiser à comprendre le passé, si l’on ne sait rien du présent » Marc Bloch |
Modification d'octobre 2025 Ironie du sort le site malaxi a disparu sans laisser de trace ! - ( de trace numérique ! )
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