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Chroniques 

Luis Sepulveda

La lampe d’Aladino
Inégal mais drôle , amusant, un recueil de nouvelles qui ranime le genre.
"L’Hôtel Z a peut-être définitivement intégré l’album des souvenirs de tous ceux qui, comme moi, sont passés par là, ont écrit leurs noms dans le registre, occupé des chambres avec le tournoiement paresseux des ventilateurs pour seule compagnie, bu du rhum et de la cachaça, mis de l’ordre dans leurs passions et leurs idées, bercés par la pluie, et décidé de ce qu’ils allaient faire de cette foutue habitude de vivre."

Short story

De même que s’habiller ou voyager, lire est une activité qui, au bout du compte, peut être au service d’une ambition. Il s’agit de se réinventer, de s’imaginer plus fort, plus authentique, capable de s’élever au-dessus des circonstances et de prendre un nouvel élan pour affronter le monde. Ainsi, une autre version de nous-mêmes apparaît en notre for intérieur : elle nous ressemble, mais elle est un peu plus sophistiquée, plus intéressante, plus proche de qui nous voudrions être…. Thomas Chatterton Williams
Le monde Publié le 22 août 2025

Frederic Berthet

Felicitad
Des nouvelles comme il en faudrait tant, elles sont drôles, enlevées, parfaitement écrites et toujours si parisiennes, je dirais presque «Modianesque» ! Je n’avais jamais lu ce livre, je ne regrette pas
"Berthet est un écrivain mondain, on déplore parfois qu’il arpentât les soirées au lieu de noircir des cahiers. Mais n’y trouvait-il pas la matière première de ces histoires ? Comme Felicitad, cette impétueuse jeune femme : « elle m’expliqua qu’il existait deux catégories de bulles de champagnes, celles qui remontaient tout de suite à la surface, et celles qui, restant au fond, retenaient leur respiration plus longtemps que les autres. » Ou « Sixtine, elle disait qu’elle aimait les scorpions, les yeux bleus, Oscard Wilde, les gens qui parlaient peu et comme voiture les Panther-Lima. Elle n’aimait pas les endives, détestait tomber amoureuse, mais adorait les réconciliations. »
Berthet est mort en 2003 à 49 ans, il laisse une œuvre trop maigre. Du coup on réédite ses rubriques (la table ronde) à peine une cinquantaine d’articles littéraires, il chroniquait au Figaro quand le journal n’était que de droite, un peu avant de devenir extrême. Si c’était aujourd’hui, j’ose imaginer qu’il ne s’y serait pas plu, ou pire n’aurait pas été invité. Toujours est-il qu’il résume sa philosophie en quelques lignes :

« Ce n’était pas très difficile d’être romantique, ces années-là, vous savez. On était romantique sans le faire exprès — et on finissait par payer le prix sans même s’en être aperçu. »

Jan Carson

Le fantôme de la banquette arrière - (nouvelles)
L’Irlande du nord est grise et pluvieuse comme les nouvelles de cette écrivaine. La plume de Carson est sans filtres et ses personnages semble amputés de toute trace d’empathie. Reste au fil de ces nouvelles une peinture cruelle d’une Irlande du Nord où, comme dans les banlieues blafardes de l‘empire, traîne des survivants sans espoir. Aussi drôle et terrifiant qu’un discourt de Boris Johson.

Graham Swift

Les nouvelles de cet auteur anglais publiées, pour certaines, dans The Télégraph, New Yorker et l’Atlantic, ont pour leitmotive : la mémoire et les résurgences. D’un simple souvenir surgit une vision neuve du présent. Où, la confrontation de ce qui fut un acte déterminent ou banal du passé du passé - durant la guerre, une jeune fille, au mépris des convenances, s’assoit dans le bus prés d’un soldat américain noir, et engage la conversation - s’entrechoque avec nos vies 8o années plus tard.
Certains textes sont, par contre exagérément longs et fastidieux, et semblent se perdre, comme leur narrateur, en conjectures. Swift tortillant à dessein les introspections des personnages. Si les séquelles de la guerre sur nos mémoires et notre vision du monde sont indéniables, l’auteur parvient à nous convaincre que, de manière induite, le traumatisme est plus profond dans la civilisation qu’il n’y paraît, et que le conflit de 1945 laisse plusieurs générations après, des traces douloureuses et des blessures morales jusqu’aux petits enfants que nous sommes. "Il existait deux choses, généralement en bois, spécifiquement destinées à accueillir un être humain. Deux objets de menuiserie. Une porte et un cercueil."

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